22 juillet 2009 SOURCE : blog L’Inspecteur La Galette http://mariejeannepasquette.blog.lemonde.fr/ |
Le 31 août prochain, le conseil d’administration d’Eiffage va décider de la reconduction de
Jean-François Roverato dans ses fonctions de Président-Directeur général. Atteint par la limite d’âge de 65 ans, ce patron, incapable d’organiser sa succession aura probablement droit à un
sursis de 3 ans.
« JFR » comme
l’appellent ses collaborateurs est ce que certains appellent “un bon patron” mais peut-il pour autant prendre des libertés avec les règles du gouvernement d’entreprise ?
Il a construit Eiffage en agglomérant des PME du BTP autour de l’ancien groupe Fougerolle. Un LBO
et vingt ans plus tard, les salariés sont les premiers actionnaires avec 22 % du capital. Les concurrents espagnols qui ont frappé à la porte en 2006, ont été éconduits . Le conseil
d’administration d’Eiffage est à la botte du PDG et celui-ci ne s’est pas privé de “tuer le fils” en évinçant en 2007, le dernier prétendant à son trône, Benoît Heitz.
Autant dire qu’il y a un problème de gouvernance chez Eiffage et cela ne date pas d’hier.
Au début des années 2000, Michel Pébereau le président de BNP Paribas, principal actionnaire, aurait tenté d’influer sur le conseil pour l’assouplir. Mais sans succès. Résultat : BNP
Paribas a cédé ses titres et Eiffage a été minutieusement verrouillé. Augmentation de capital possible en période d’ OPA et déclaration des franchissements de seuil par palier de 1 %, Eiffage
dispose d’une panoplie anti-OPA efficace.
Et comme si ça ne suffisait pas, le PDG s’est construit un conseil d’administration sur mesure. En 2008, il ne comptait que 8
administrateurs dont un seul indépendant Bruno Flichy, ancien PDG du Crédit du Nord, âgé de plus de 70 ans. Deux nouveaux « indépendants » sont rentrés en 2008, deux
clients d’Eiffage portant le nombre des administrateurs à 10.
Le rapport Afep Medef réclame 50 % d’indépendants. JFR en fait valoir 30 %. Et ce n’est pas le comité des nominations et des rémunérations de deux membres qui aurait pu changer quelque-chose. Il est présidé par l’ancien patron et toujours administrateur de Vinci, Serge Michel, 83 ans, qui, en 2008, a touché 60 000 € de jetons de présence d’Eiffage et lui a facturé 79 000 € de prestations de gestion et de conseil via sa société Soficot. S’il avait pu faire valoir son indépendance, c’est lui qui aurait dû veiller à ce que la succession du PDG soit convenablement assurée.
Il est probablement trop tard, à un mois de l’échéance pour trouver une alternative et pour JFR, il
n’en est pas question. Riche de plus de 1 % du capital d’Eiffage (40 M€), Jean-François Roverato est prêt à donner des gages pour rester à son poste. Il a
renoncé aux stock-options et, pour 2009, il a consenti un abattement de 10 % sur sa rémunération de 1,8 M€
versée en 2008. Il se rapproche ainsi de la rémunération médiane des dirigeants de très grands groupe les mieux payés qui selon l’AMF atteint 1,47 M€. Mais le patron d’EIffage
ne précise pas les critères de performance atteints pour justifier de la partie variable de sa rémunération au titre de 2008, ni ceux retenus pour l’attribution de stock-options ou
d’actions gratuites aux collaborateurs.
Chez Eiffage, on ne s’embarrasse pas de petits détails, quitte à ne pas respecter toutes les recommandations AFEP MEDEF. Ainsi le PDG qui ne bénéficie ni de retraite chapeau et ni de parachute doré, n’a toujours pas abandonné le contrat de travail qu’il cumule avec son mandat social. Il ne suit donc pas la voie tracée par l’organisation patronale.